Qu’est-ce qui nous saisit dans le visage de l’autre ?

Ça arrive tous les jours, à chaque minute, à chaque seconde, en chaque lieu de la Terre. Mais pourquoi ?

Qu’est-ce qui fait que ce visage anonyme que l’on croise au détour d’un couloir interrompt un instant le flot monotone du temps ?

Pour moi, aujourd’hui, c’était à 18h20. Je cheminais vers la ligne 2 dans les couloirs de Nation.

Il y a là un virage périlleux, sans visibilité, où il faut regarder devant soi pour éviter les collisions. Mais parfois, regarder, c’est au contraire les précipiter.

Je vois une jeune femme aux cheveux chatains s’avancer. Pour ne pas lui barrer la route, je la regarde arriver, de sorte à ajuster ma trajectoire.

Mais ce faisant, je vois son visage. Et je le trouve beau.

Elle passe à côté de moi tandis que le temps ralentit. Mes yeux fatigués détaillent un grain de beauté sur sa joue blanche. Et il devient montagne noire sur une plaine enneigée. Quel allure singulière ! Quel air altier !

La belle passe. Le temps reprends son cours.

Je ne la reverrai jamais. Et ne me restent que mes questions ?

Qu’est-ce qui fait qu’un visage inconnu puisse nous faire un tel effet ? Qui ne l’a vécu ?

Et d’où vient cette étrange familiarité que ces traits inconnus nous inspirent ? Est-ce l’idée du beau qui se rappelle à notre mémoire su fond de notre caverne, et qui nous élève en cet état auquel nous ne sommes plus accoutumé, où le temps et le moi se fondent en un grand vide ?

Ou est-ce la fugacité elle même qui magnifie un moment que nous aurions - qui sait ? - abhorré s’il avait duré une éternité ?

Et pourtant c’est aujourd’hui à cette eternité que j’aspire : revoir encore ce miracle. Encore et encore et encore.

C’est bizarre.

    Détails

  • Métro2à Nation.
  • Une rencontre faite le 28 avril 2017.
  • Rédigé par un homme pour une femme.
  • Publié le vendredi 28 avril.