J’ai couru !

Je sais que mes habits sont en haillons… vois-tu : j’ai traversé un jardin de rosiers où les branchages m’ont empoigné.

Ce rouge que tu vois, je ne m’en cache pas : ce sont les épines qui ont sillonné ma chair.

Je sais que ce n’est plus un beau visage, avec ces cicatrices. Mon voyage a été long, ce jardin a été grand…

Si j’ai les bottes embourbées, c’est que j’ai pris un chemin de traverse, lorsque j’ai entraperçu ton reflet, derrière la vitre du wagon… il a fallu que je coure pour te rattraper.

J’attendais ton regard; j’attendais tes yeux… Oh ! je n’espérais pas y voir des merveilles, mais juste mon reflet… et me dire : “j’ai passé dans sa vie ! Elle m’a vu !”

J’attends encore… Qu’as-tu donc ? Tu n’as qu’à tourner le visage, tu n’as qu’à lever les yeux ! Le reste : nos cœurs s’en chargeront…

Hésites-tu ? C’est à cause des haillons, des blessures, du sang et de la bourbe ? Non, je ne mens pas : aucun de mes pas n’a été parfait… mes faussetés et mes erreurs, je les porte en moi comme des trous béants d’où le sang coule à flot… Mais si tu savais !

Si tu savais qu’une seule de tes caresses refermeraient toutes ces plaies ! Qu’à la seule vue de ton regard posé sur moi, je guérirai… et qu’un seul de tes baisers - mon Dieu, mon cœur s’étourdit à y penser - … parachèverait ma vie ! Il me semble que tu as baigné dans une eau céleste, semblable à la fontaine de Job, et tu es sortie - comme par enchantement - au milieu de cette rame de métro… pour bénir mon cœur.

Rien en moi n’est parfait ? Mais si… une seule chose : le regard que je te porte.

Tu ne te retournes pas…. es-tu pressée ?

Cela va si vite… Non ! Attends !

Tu es sortie… tu es partie !

Tu es partie !

S’il arrive, ce soir - ou un autre - qu’au milieu de la nuit tu te réveilles… que des larmes te coulent des yeux… et qu’aucune main amoureuse ne vient les recueillir au sein de tes joues… sache qu’il y a un homme seul, qui aurait aimé y être, mais qui pourtant se balade cette nuit là, solitaire, près des eaux silencieuses et noires de l’Ourcq…

    Détails

  • Métro7à Stalingrad.
  • Une rencontre faite le 11 mars 2014.
  • Rédigé par un homme pour une femme.
  • Publié le mardi 11 mars.