La princesse du béton

Un matin, je marchais dans les couloirs mornes de la gare de Chatelet les Halles, les mains dans les poches et la musique à fond jusque-là rien de fou. Tiens un premier portique, hop un deuxième. Au fond, les aléas de la foule me font penser au grouillement des fourmis dans les tunnels sombres de leur ferme. Une personne passe, une autre la suit, une file se forme face ces portes automatiques. Devant cette scène, je cherche du regard un éventuel passage déserté. Quelle ne fût pas ma surprise de constater que le portique voisin était totalement oublié des passants. Cette scène me parut d’abord coquasse, tous ces gens qui comme les fourmis semblent suivre les phéromones laissés par leurs congénères. Dans la logique du choix entre l’option A et l’option B, la question ne paraît même pas envisageable.

Après cette interrogation matinale digne des cerveaux les plus fatiguées. Je me dirigeais, comme à mon habitude vers la ligne A du RER en direction de Marne la Vallée. Au départ, si la perspective de me retrouver avec des marmots vêtues de casquettes Donald Duck et de T-shirts Mickey Mouse pouvait me faire sourire et bien, vous qui prenez peut-être fréquemment cette ligne vous savez donc que cette époque est révolue ! Non, je suis monté, comme d’habitude dans un wagon bondé de personnes le regard dans le vide. Je suis donc grimpé dans le wagon et ne voyant pas de places assises, je me suis agrippé à une barre de métal étonnement poisseuse. Le train est parti sans demander son reste, les voitures sont ballottées doucement et chacun s’attarde à contempler ce que certains gourous appellent le Grand Rien ! Moi je relis les stations, en fait je crois que je les connais par cœur maintenant.

Le train arrivant à Gare de Lyon je vois que des places se libèrent. En descendant au Rez-de-chaussée de ce RER à étage, je contemple deux places libres, présentes dans deux carrés différents. Je ne choisis pas ma place, je laisse mes fesses le faire pour moi. Et levant les yeux, je me suis aperçu être assis devant la jeune femme la plus jolie que j’ai vu depuis bien longtemps. Ses cheveux bruns et courts laissaient briller ses deux grands yeux. Je ne saurais vous dire s’ils étaient vert ou marron clair. Une chose est sûr j’ai été hypnotisé. Il y a plusieurs manières d’être envouté, moi comme un idiot je me laisse envouter en prenant un soin infini à ce que la personne face à moi n’y voit que du feu. Bref, je crois que j’ai souffert en silence. Elle lisait paisiblement un livre et dans ma tête résonnait une petite voix : « elle est trop bien pour toi, elle est trop bien pour toi ». Voyant venir la station de Noisy Champs, j’ai saisi mon sac et je suis sorti, je pensais oublier cette histoire hélas, ces trois paragraphes prouvent que non.

C’est dingue comme une simple personne peut briser notre torpeur quotidienne !

    Détails

  • RERaà Châtelet — Les Halles.
  • Une rencontre faite le 17 novembre 2014.
  • Rédigé par un mec pour une femme.
  • Publié le lundi 17 novembre.