Sans un regard

Il y avait beaucoup de monde sur le quai, dans ton wagon aussi, aux alentours de 19h00. J’ai à peine eu le temps de lancer un regard dans ta direction que déjà les passagers se massaient contre nous, si bien que je me trouvais dos à toi, collée à toi, essayant de me souvenir à quoi tu ressemblais, n’osant surtout pas me retourner de peur que tu n’enlèves ton genou pressé contre ma jambe, que tu cesses cette audacieuse danse contre mes fesses. A moins que ton corps ne mimait que les mouvements du métro, à moins que mon imagination ne formait qu’un joyeux délire.

Puis d’autres passagers sont venus chasser les derniers espaces disponibles, m’obligeant à être cette fois-ci contre ton dos, le souffle profond et tremblant dans tes cheveux odorants, le cœur battant, mes yeux admirant ton jogging gris chiné, tes timberland, ton sac à main noir, ton manteau noir, ma main baguée enserrant la barre centrale, mon bras t’entourant, moi n’osant pas te coller davantage de peur d’être oppressante.

Et le wagon a fini par se vider. Et je me tenais derrière toi, contre la porte, toi toujours de dos, un air de reggae pour m’apaiser. Et je suis descendue, à Ménilmontant, sans un regard pour toi.

    Détails

  • Métro2à Place de Clichy.
  • Une rencontre faite le 11 février 2016.
  • Rédigé par une meuf pour une meuf.
  • Publié le vendredi 12 février.