” Sur la ligne Montreuil- Pont-de-Sèvres, vingt…

” Sur la ligne Montreuil- Pont-de-Sèvres, vingt deux stations me séparaient de ma destination. En même temps que moi monta dans le métro une jeune fille maigrichonne, au regard triste, qu’auparavant j’avais vu descendre, au coin du boulevard Voltaire, d’une automobile ” de grosse cylindrée” et qui aurait pu jouer Cosette dans une adaptation contemporaine des Misérables. Comme elle était montée dans le wagon précédant le mien et qu’elle s’y tenait debout, à proximité de la vitre arrière, je pouvais l’observer à loisir aussi longtemps que nos deux wagons demeuraient alignés mais je la perdais de vue - ou tout du moins l’angle sous lequel je l’observais à la dérobée variait soudainement - lorsque les sinuosités de la voie rompaient momentanément cet alignement. Jusqu’à ce qu’elle descende, l’idée qu’elle pût ne pas se rendre à Marcel-Sembat ( comme moi ) prit une importance croissante et un caractère de plus de plus douloureux, abolis l’un et l’autre presque instantanément sitôt qu’elle eût pour de bon disparu. ”

Jean Rolin, Zones, 1995.

    Détails

  • Métro9à Marcel Sembat.
  • Une rencontre faite le 5 juin 1994.
  • Rédigé par un homme pour une femme.
  • Publié le jeudi 21 septembre.