Jeune femme au débardeur jaune, pochette bleue, de Barbès à Place Clichy

Ce premier jour de printemps (y’a plus d’saison m’sieurs dames) a pris tout son sens grâce à vous/toi, il était à peine plus tard que 12h, je traînais une gueule de bois parce que je filais un mauvais coton, et vous, vous portiez un débardeur jaune, un pantalon sombre, teniez une pochette bleue contre votre poitrine (stylos papiers? j’ai pas pu noter la marque, navré). Il me semble que vous êtes montée à Barbes, direction Dauphine; je sais que vous êtes sortie à Place de Clichy, et j’aurais pu y descendre aussi.

J’ai passé une partie du trajet adossé à la porte côté quai du métro, à côté de vous. Vous illuminiez ce foutu wagon. J’ai jeté des regards furtifs, votre caboche semblait pleine et votre journée organisée. Je ne voudrais pas passer pour un fou, mais une bonne aura se dégageait de vous. Cela aurait dû me pousser à vous laisser douter de mon penchant pour votre troisième œil, coûte que coûte, vaille que vaille et galère qui galère.

Au lieu de cela, je me suis poussé vers le fond du wagon, puis je me suis trouvé derrière vous, le nez dans vos cheveux bruns avec le loisir de respirer cette bonne odeur d’encens. Ce petit voyage capillaire m’offrait le dernier bastion de fraîcheur au milieu du nuage des poussées hormonales de trente passagers. J’hésitais à laisser transparaître ma faiblesse. J’étais concentré sur mon incapacité de réagir à la tentation de me faire remarquer. J’ai pensé aligner une phrase pas trop travaillée, tenter un truc amusant, bêtement. Les râteaux du collège ont cela de profondément psychanalytique. Dans le wagon, les roumains qui déroulaient leur romance planplan m’ont définitivement dissuadé de tenter quoi que ce soit (ou prolongé mon indécision); craignant un coup de tête inutile, de vous rendre mal à l’aise ou de me ridiculiser publiquement en jouant de suavités, je suis resté sans voix. A mon grand regret. J’adore me ridiculiser. J’aime bien les roumains aussi c’est pas là le problème.

J’ai failli descendre à place de clichy pour rattraper cette silhouette qui allait quitter mon monde à jamais et réclamer au moins un prénom, pour savoir quelles lettres je dus associer à ce visage qui respire intelligence et bonté, et cette odeur, qui m’inspireraient limite une balade de ménestrel un peu taré en gamme mineure mélodique

Si tu t’y cherches et que tu t’y trouves, eh ben c’est chouette.

Pour faire valoir ce que de métro,

    Détails

  • Métro2à Place de Clichy.
  • Une rencontre faite le 14 avril 2013.
  • Rédigé par un homme pour une femme.
  • Publié le dimanche 14 avril.